📑 Sommaire
- F5 victime d’une cyberattaque : leçons pour les entreprises et collectivités
- Contexte et déroulé de l’attaque sur F5
- Pourquoi cette attaque est si dangereuse (et quels risques pour vous)
- Enjeux cybersécurité pour TPE/PME et collectivités : pourquoi cela vous concerne
- Guide pratique : comment renforcer votre cyberdéfense
- Aspects légaux, obligations et posture de réponse
- Cas concrets & bonnes pratiques inspirées du cas F5
- Conclusion & appel à l’action
- FAQ - Foire aux questions sur l'incident F5
F5 victime d’une cyberattaque : leçons pour les entreprises et collectivités
La confiance technologique peut parfois être mise à rude épreuve. Récemment, F5, fournisseur majeur de solutions de sécurité et d’infrastructure réseau, a reconnu avoir été la cible d’une cyberattaque sophistiquée - avec des conséquences potentielles bien au-delà de ses murs. Cette attaque, attribuée à un acteur étatique associé à la Chine, a permis l’exfiltration de portions de code source et d’informations sur des vulnérabilités non publiées.
Pour les dirigeants de TPE, PME, collectivités locales ou tout professionnel ayant des obligations légales de sécurité (RGPD, services sensibles, etc.), cet événement est un signal d’alarme : même les firmes de cybersécurité ne sont plus à l’abri. Dans cet article, je vous propose une analyse complète : de la chronologie de l’attaque à ses implications, jusqu’aux actions concrètes que vous pouvez mettre en œuvre pour protéger votre organisation.
Contexte et déroulé de l’attaque sur F5
Qui est F5 et pourquoi c’est une cible stratégique
F5 est un acteur mondial des technologies réseau et de la sécurité applicative : ses solutions (comme BIG-IP, F5OS, etc.) sont utilisées pour la gestion du trafic, la répartition de charge, la sécurité des applications (WAF), les contrôles d’identité, etc.
Parce que ses produits sont déployés “au bord” des réseaux (edge), les systèmes F5 sont en position stratégique - ils traitent du trafic critique, filtrent, inspectent, équilibrent les flux. En compromettant cette infrastructure, un attaquant peut potentiellement influencer, surveiller ou intercepter des communications sur les réseaux des clients.
De plus, F5 fournit des mises à jour logicielles à ses clients - ce qui en fait une cible idéale pour les attaques sur la chaîne d’approvisionnement (supply-chain).
Chronologie et actions connues de l’attaque
Voici ce que l’on sait jusqu’à maintenant :
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F5 a déclaré avoir détecté un accès non autorisé le 9 août 2025.
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L’attaquant aurait eu un accès “persistant” et “long terme” à certains environnements de développement de F5, probablement pendant plusieurs mois ou même plus d’un an selon certains rapports.
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Au cours de cette période, des fichiers ont été exfiltrés : des portions de code source de BIG-IP, ainsi que des informations sur des vulnérabilités internes non encore corrigées.
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On ne dispose pas encore de preuves publiques que des vulnérabilités nouvelles aient été exploitées dans la nature, ou que la chaîne de production de F5 ait été compromise (c’est-à-dire que les mises à jour des clients auraient été trafiquées). F5 affirme ne pas avoir identifié de modifications malveillantes de sa supply-chain.
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En réaction, l’autorité américaine CISA (Cybersecurity & Infrastructure Security Agency) a publié une directive d’urgence (Emergency Directive 26-01) obligeant les agences fédérales américaines à inventorier, patcher ou remplacer les équipements affectés.
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Cette directive souligne que l’accès aux codes source et aux détails de vulnérabilités internes constitue une menace “imminente” pour les réseaux américains.
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Le vecteur d’attaque mentionné en association est un malware appelé Brickstorm, attribué à un groupe lié à la Chine (UNC5221 dans certaines enquêtes), spécialisé dans le vol de propriété intellectuelle et de codes sources.
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Le nom de l’attaquant n’a pas été officiellement confirmé par F5 ou par les autorités américaines, mais plusieurs médias et analystes incriminent un acteur étatique chinois.
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L’attaque a provoqué une forte chute du cours de l’action F5 (près de -12 %) immédiatement après l’annonce.
Réactions, alertes et mitigation
Les réactions notables :
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CISA a ordonné un patch accéléré ou un remplacement pour tous les équipements F5 des agences fédérales américaines, dans un délai très court (quelques jours).
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Le Royaume-Uni - via son NCSC (National Cyber Security Centre) - a également émis des alertes à l’intention des utilisateurs de solutions F5.
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F5 a mobilisé des firmes externes (CrowdStrike, Mandiant, NCC Group, ...) pour enquêter et contenir la brèche.
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Des correctifs (patches) ont été publiés pour BIG-IP, F5OS, etc., et F5 a envoyé un guide “threat hunting” à ses clients pour détecter la présence du malware Brickstorm.
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Des experts alertent que l’accès aux sources et aux vulnérabilités internes pourrait permettre de développer des exploits plus efficaces, contourner les protections existantes, ou même créer des backdoors ciblées.
Cette attaque illustre parfaitement une menace majeure : le compromis d’un acteur de la chaîne d’approvisionnement, utilisé comme levier pour menacer de très nombreuses organisations clientes.
Pourquoi cette attaque est si dangereuse (et quels risques pour vous)
Pour bien comprendre les impacts possibles sur votre structure (TPE, PME, collectivité), voici les principaux risques induits :
Une menace sur la chaîne d’approvisionnement (supply-chain)
Lorsque l’attaquant accède aux systèmes d’un fournisseur - ici F5 - il peut potentiellement injecter un code malveillant dans les mises à jour logicielles distribuées à des centaines ou milliers de clients. Il s’agit du fameux "tainted update" ou mise à jour empoisonnée.
Dans le cas présent, même si F5 assure ne pas avoir constaté de modifications malveillantes, l’accès aux codes sources et aux vulnérabilités permet aux hackers de bâtir des exploits "0-day" ou "1-day" plus facilement, très ciblés, voire invisibles pour les systèmes de détection classiques.
Escalade de privilèges et mouvements latéraux
Un équipement F5 compromis peut être utilisé comme point pivot dans le réseau : l’attaquant peut surveiller ou manipuler les flux, usurper des sessions, dérober des identifiants ou des clés API, ou franchir d’autres réseaux internes de l’entreprise.
Exfiltration de données sensibles
Si l’attaquant parvient à s’infiltrer via un vecteur F5, il peut accéder aux serveurs, bases de données, fichiers confidentiels. Une fois "dans la maison", il peut pivoter vers d’autres systèmes critiques.
Impact sur la confiance, la réputation et les obligations légales
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Une faille de sécurité entraînant une fuite de données (clients, employés, partenaires) peut déclencher des sanctions RGPD, des obligations de notification à la CNIL, et des poursuites.
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Pour les collectivités, des données publiques, données citoyennes peuvent être exposées, portant atteinte à la mission de service public.
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La réputation, la confiance client, les relations fournisseurs peuvent être gravement affectées.
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Les assureurs cyber peuvent refuser de couvrir certains sinistres si les mesures de base n’étaient pas mises en place.
Risque de "exploit en cascade"
Si des vulnérabilités internes (non corrigées) étaient connues par l’attaquant, il peut attendre que les conditions soient favorables (nouvelle configuration, ancien firmware, défaut de patching) pour lancer l’attaque au moment le plus opportun.
Menace pour les secteurs sensibles
Certaines entités (hôpitaux, services publics, infrastructures critiques) sont particulièrement exposées. Une compromission d’un équipement de sécurité d’un fournisseur comme F5 peut entraîner des impacts graves (disruption, sabotage, espionnage).
Enjeux cybersécurité pour TPE/PME et collectivités : pourquoi cela vous concerne
L’illusion de "ce n’est pas pour moi"
Beaucoup de petites structures pensent être "hors cible" car elles ne sont pas "interessantes" pour les hackers. C’est une grave erreur. Les cybercriminels ou acteurs étatiques ciblent souvent les "petits maillons faibles" pour rebondir vers des structures plus critiques via des interconnexions (fournisseurs, partenaires).
Taux élevé d’attaques réussies sur les TPE/PME
Selon diverses études (et ainsi les observations de CERT-FR / ANSSI), les attaques par phishing, compromission des emails, ransomware, injection de code via des systèmes non sécurisés sont monnaie courante dans les petites structures.
Dans le rapport de l’ANSSI (CERT-FR) "CYBER THREAT OVERVIEW 2024", l’agence souligne que les vulnérabilités des edge devices (routeurs, pare-feu, équipements de bord) sont fréquemment exploitées pour lancer des opérations de cyberdéfense ou exfiltration.
Obligation légale / conformité règlementaire
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Le RGPD impose la "sécurité des données" : les responsables de traitement doivent mettre en œuvre des mesures techniques et organisationnelles proportionnées.
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Pour certaines structures (services publics, santé, infrastructures critiques), des obligations spécifiques de durcissement, de déclaration d’incidents ou de certification peuvent s’appliquer.
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En cas d’incident avéré, des notifications à l’autorité de contrôle (ex : CNIL) et aux personnes concernées peuvent être exigées.
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L’absence de diligence raisonnable en cybersécurité peut engager la responsabilité civile ou pénale des dirigeants.
Le gain sociétal / stratégique
Investir dans la sécurité ne protège pas seulement vos actifs : cela renforce la résilience de l’écosystème local (fournisseurs, clients), préserve la continuité de service, rassure les parties prenantes (clients, partenaires, usagers).
Guide pratique : comment renforcer votre cyberdéfense
Voici un plan d’action structuré, étape par étape, pour renforcer la sécurité de votre organisation.
Étape 1 : diagnostic et inventaire
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Cartographiez vos actifs numériques : serveurs, équipements réseau, logiciels, postes clients, API, interconnexions.
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Identifiez les équipements à haut risque (pare-feu, routeurs, solutions de sécurité, edge devices).
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Vérifiez les versions, mises à jour, firmware de ces équipements : quels sont les patchs appliqués ?
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Auditez les privilèges : qui a accès à quoi (administrateurs, comptes techniques, service IT).
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Évaluez les dépendances externes : fournisseurs, prestataires, partenaires.
Demander un Diagnostic cybersécurité certifié
Étape 2 : mesures de durcissement technique
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Appliquez immédiatement les patchs critiques : en particulier pour les équipements de sécurité, les solutions web, petits appliances.
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Désactivez ou limitez les services non nécessaires (ports, modules inutilisés).
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Segmentez votre réseau : séparez les zones sensibles des zones plus exposées.
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Mettez en place une solution de pare-feu applicatif (WAF) pour protéger vos applications web.
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Activez la journalisation et la surveillance (logs) : collectez les alertes des systèmes et examinez les comportements anormaux.
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Déployez un système de détection d’intrusion (IDS/IPS) et/ou de détection des anomalies.
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Mettez en place une gestion stricte des identités (IAM) : contrôle d’accès le moins privilégié, double authentification (2FA/MFA).
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Chiffrez les données sensibles au repos et en transit.
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Protégez vos mises à jour : signature, vérification des sources, revue des mises à jour avant déploiement.
Étape 3 : gouvernance, processus et vigilance humaine
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Sensibilisez et formez vos collaborateurs (phishing, bonnes pratiques, signalement).
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Mettez en place une politique de sécurité écrite, claire, régulièrement mise à jour.
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Procédez à des audits de sécurité / tests d’intrusion périodiques, idéalement par des tiers.
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Élaborez un plan de réponse à incident (détection, confinement, éradiquation, restauration).
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Effectuez des sauvegardes régulières (et tests de restauration).
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Contractualisez des SLA / clauses de sécurité avec vos fournisseurs (cloud, prestataires).
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Surveillez les menaces (threat intelligence) : abonnements à des flux de vulnérabilités, alertes CERT, veille sectorielle.
Étape 4 : simulation et exercices
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Organisez des simulations d’attaque (phishing, intrusion simulée) pour tester vos défenses.
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Faites des revues post-mortem après chaque incident ou exercice pour améliorer le dispositif.
Étape 5 : audit, conformité, assurance
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Assurez-vous de respecter les obligations réglementaires (RGPD, normes sectorielles).
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Faites auditer votre dispositif par des tiers indépendants.
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Envisagez une assurance cyber adaptée, après avoir atteint un niveau minimum de sécurité défensif.
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Conservez les preuves / logs pendant une durée légalement définie en cas d’enquête ou contentieux.
Aspects légaux, obligations et posture de réponse
Notification d’incident et obligations légales
Selon le RGPD (article 33 et 34) :
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En cas de violation de données personnelles, le responsable doit notifier la CNIL dans les 72 heures après en avoir pris connaissance, sauf si la violation n’est pas susceptible d’engendrer un risque pour les droits et libertés des personnes.
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Si le risque est élevé, la notification aux personnes concernées est aussi nécessaire.
Pour les collectivités et entités publiques, il peut exister des obligations sectorielles ou des obligations de déclaration à l’autorité nationale de la sécurité.
Responsabilités des dirigeants
Un défaut de mise en œuvre des mesures de sécurité élémentaires peut engager la responsabilité civile voire pénale des dirigeants. En cas de faute (négligence grave en sécurité), des condamnations sont possibles.
Coopération et signalement
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En France, le CERT-FR est l’instance de référence pour la gestion et le signalement d’incidents informatiques.
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Le centre national de réponse aux incidents assure une coordination, des conseils et des appuis techniques.
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Collaborer avec les autorités judiciaires / policières / ANSSI est souvent indispensable.
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La transparence est souvent préférable : en informer les parties prenantes peut limiter le coût réputationnel si la réponse est bien gérée.
Preuves, forensique et audits
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Il faut conserver les logs, copies de sauvegarde, éléments de preuve durant la durée légale ou en tant que requis par enquête.
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Faire appel à des experts en investigation numérique pour mener des analyses forensiques (identifier l’ampleur, la source, les mécanismes d’attaque).
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Après l’incident, faire un audit externe pour identifier les failles, remédier, tirer des enseignements.
Cas concrets & bonnes pratiques inspirées du cas F5
Leçons tirées de l’affaire F5
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Même les fournisseurs de sécurité tombent : ne jamais se reposer uniquement sur un éditeur.
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Surveillance des chaînes d’approvisionnement : vérifiez ce que vos fournisseurs font en matière de sécurité.
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Réactivité est clé : le patching rapide et la réponse immédiate sont essentiels pour limiter les dégâts.
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Menace persistante : les attaquants restent longtemps dans les systèmes ; la détection fine est indispensable.
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Flux de threat intelligence : en ayant accès à des alertes fiables (ex : Brickstorm), vous pouvez chercher les signes précoces d’attaque.
Scénarios simulés
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Scénario A (PME de 30 salariés) : un des dispositifs de périmètre (pare-feu/edge device) n’est pas patché depuis 18 mois. Un attaquant exploite une vulnérabilité connue, pénètre dans le réseau, vole des données clients sensibles, et exige une rançon.
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Mesures de prévention : patch régulier, segmentation du réseau, sauvegardes hors ligne, plan de réponse.
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Réaction : confinement rapide, restauration des sauvegardes, notification aux autorités, communication transparente.
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Scénario B (collectivité locale) : un logiciel de portail web municipal est vulnérable. Un acteur malveillant détourne des données citoyennes ou modifie des contenus publiques.
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Mesures : audit régulier du code, WAF, revues de sécurité, backups réguliers.
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Réaction : restauration, alerte publique, enquête, renforcement du dispositif.
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Bonnes pratiques recommandées
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Installez une veille de vulnérabilités sectorielle (CERT, ANSSI, éditeurs)
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Adoptez MFA / 2FA pour l’ensemble des accès critiques
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Privilégiez moindre privilège dans les droits d’accès
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Segmentez le réseau (zone DMZ, zone interne, zone administrative)
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Faites des tests d’intrusion réguliers (externes, internes)
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Assurez-vous que les fournisseurs (y compris ceux de logiciels de sécurité) offrent des garanties de sécurité, des audits, une transparence
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Maintenez des plans de reprise et de restauration testés
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Réalisez des simulations d’attaque (tabletop exercise)
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Envisagez des partenariats avec des prestataires de cybersécurité pour externaliser la surveillance ou la réponse à incident >> Contacter un expert CORE SECURITY
Conclusion & appel à l’action
L’attaque récente sur F5 doit constituer un électrochoc pour toutes les organisations, y compris les plus modestes. Si une firme de cybersécurité de renommée mondiale peut être compromise, personne n’est à l’abri.
Mais ce constat n’est pas une fatalité : avec une approche rigoureuse et progressive (diagnostic, renforcement, gouvernance, surveillance), on peut bâtir une résilience crédible face aux menaces numériques.
Pour les dirigeants de TPE/PME, collectivités, vous disposez aujourd’hui de l’occasion d’agir avant que votre système ne soit ciblé. Voici votre plan d’action immédiat :
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Réalisez un inventaire complet de vos systèmes critiques
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Identifiez les dispositifs de sécurisation de périmètre (firewalls, modules de sécurité, WAF)
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Appliquez sans délai les correctifs critiques
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Activez une surveillance des logs et comportements suspects
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Formalisez un plan de réponse à incident
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Sensibilisez vos équipes au phishing et aux accès compromis
CORE SECURITY peut vous aider à construire une check-list personnalisée, un audit de votre architecture ou une feuille de route cyber adaptée à votre structure.